Où sont les lesbiennes à Cannes ?

Dans un festival qui ressemble de plus en plus à une réunion de vieux messieurs (Scorsese, Moretti, Bellochio, Indiana Jones, Ken Loach, Tarantino…), il est nécessaire de mener une enquête approfondie pour garder espoir et trouver les potentielles pépites queer que Cannes peut nous apporter cette année. Quels sont les films qui envoient des signaux queer et où sont les réalisatrices lesbiennes dans les sélections officielles et parallèles ? Voici ma moisson

Quinzaine des cinéastes

A Song Sung Blue, de Zihan Geng. L’affiche de ce premier film d’une jeune réalisatrice chinoise laisse augurer d’une jolie romance lesbienne entre ados. Liu Xian a 15 ans et doit passer l’été chez son père, une perspective ennuyeuse et solitaire, jusqu’à ce qu’elle rencontre Jin Mingmei. Un film lesbien dans la lignée de tous ces films d’été type My Summer of love, Summer, My First Summer ? Avec en plus du bleu dans le titre, couleur chaude s’il en est ? Prudence cependant : Variety parle plutôt d’une belle “amitié”… Ce qui peut vouloir dire tout et rien. A noter que le film sera distribué par Totem Films.

Il faudra aussi compter avec un nouveau film de Bertrand Mandico : Connan. Alors je déteste le queer de Mandico, je trouve que c’est de la réappropriation esthétique à des fins hétéronormatives, mais on n’est pas à l’abri d’une bonne surprise. Cette fois, en plus de son épouse qui est dans tous ses films, il caste Christa Theret (pronom iel, découvert·e dans LOL) pour jouer Conan le Barbare.

Deux films qui ne semblent pas queer à première vue, mais j’ai quelques suspicions sur Blackbird, Blackbird, Blackberry, un film féministe réalisé par Elene Naveriani, pronom iel, dont le film précédent parlait d’un grand-père homosexuel. Peut-être aussi intéressant : Creatura, un film espagnol de Elena Martin Gimeno qui aborde le sujet de “l’éveil sexuel” – pas uniquement hétérosexuel, on espère.

En court-métrage à la Quinzaine, nous surveillerons particulièrement Mast-del de Maryam Tafakory (pronom she/they sur Instagram), un film décrit comme une “proposition hybride et expérimentale sur l’oppression des femmes en Iran.”

Semaine de la critique

La Semaine est déjà la meilleure section parallèle puisque le film d’ouverture est celui de l’icône lesbienne Marie Amachoukeli : Ama Gloria, un premier long métrage en solo pas du tout lesbien mais certainement très bien. Le film mélangera prises de vues réelles et animation pour raconter “l’attachement profond de Cléo, 6 ans, pour Gloria, sa nourrice.”

Ama Gloria, de Marie Amachoukeli

Ava Cahen, sélectionneuse de la Semaine, parle d’une “vision queer et rassembleuse” à propos du film brésilien Levante (Power Alley) de Lillah Halla. C’est l’histoire de Sofia, sportive de haut niveau qui se retrouve enceinte et doit avorter dans un pays où c’est encore illégal.

Levante, de Lillah Halla

Le Ravissement d’Iris Kaltenbäck sera-t-il lesbien ? Aucune idée mais notons que le dossier de presse parle d’une “amitié féminine fusionnelle”, a priori entre Hafsia Herzi et Nina Meurisse.

Une petite suspicion de queerness mais surtout une grande curiosité pour le film Tiger Stripes d’Amanda Nell Eu, un film malaisien qui semble reprendre le thème du très réussi dernier Pixar, Alerte Rouge (Turning Red). Un film sur l’adolescence des jeunes filles et une réalisatrice qui pose avec son chat sur le site officiel de la Semaine.

Amanda Nell Eu

Le court-métrage co-réalisé par Iris Chassaigne et Jehnny Beth Stranger sera présenté en séance spéciale. Il s’agira pour Jehnny Beth de redonner le goût de vivre à Agathe Rousselle, inoubliable dans Titane. Ce synopsis + ce casting + le fait que le précédent court d’Iris Chassaigne, Swan dans le centre, était déjà lesbien : ce serait très étonnant que ce Stranger ne soit point sapphique.

Strangers, de Iris Chassaigne et Jehnny Beth

Un certain regard

Pas grand chose à se mettre sous la dent dans cette sélection si ce n’est peut-être un premier long au titre intrigant : How to have sex. Un film qui aborde la question des violences sexuelles lors d’un “rite de passage typiquement britannique” : les vacances à Majorque. Le mimétisme et la peer pressure dans la sexualité adolescente mais aussi la solidarité féminine devraient faire partie des thèmes abordés. La réalisatrice Molly Manning Walker se définit comme queer sur son Instagram et a fondé une équipe de foot amateur pour femmes et personnes non-binaires, le Babe City FC. Un move lesbien s’il en est. Fait-elle partie de cette nouvelle vague de réalisatrices britanniques queer / lesbienne avec Charlotte Wells et Georgia Oakley ? Il y en a combien ??

Molly Manning Walker

Sélection officielle

L’une des représentations lesbiennes en compétition officielle sera (malheureusement) dans Le Retour de Catherine Corsini. Lire le recap de l’affaire autour de ce film.

Selon nos informations, le film de Justine Triet, Anatomie d’une chute, contient aussi une storyline lesbienne : le personnage principal (Sandra Hüller, vue dans Toni Erdmann notamment) a eu une histoire avec l’une de ses anciennes élèves (Jehnny Beth, peut-être) par le passé et se fait juger là-dessus, entre autre. Ce n’est pas l’intrigue principale cependant.

Anatomie d’une chute © 2023 Les Films Pelléas – Les Films de Pierre
0 Shares:
Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

You May Also Like