On ne sait jamais par où commencer une œuvre quand elle est monumentale et culte comme celle de Chantal Akerman, quand on nous dit qu’elle a révolutionné le cinéma et qu’on a un peu peur de ne pas être à la hauteur. Alors pourquoi pas la biographie comme introduction, ou plutôt la biofiction, puisque c’est ce qu’a choisi de faire Florence Andoka : une sorte d’enquête biographique aidée par l’imaginaire. Il faut s’enlever du crâne les réflexes journalistiques de type « sources ? » et se laisser porter par ce dispositif particulier, le récit à la 2e personne, la chronologie imprévisiblement elliptique et la poésie, les vers qui surgissent dans le récit. On n’est clairement pas dans une fiche Wikipédia : tant mieux.
On assiste à la genèse de certains films, on croise des amoureuses, un ami gay à New York, on la suit au marché acheter des navets, on découvre avec elle Thérèse et Isabelle de Violette Leduc ou les photos lesbiennes de Tee Corinne et bien sûr on rencontre Delphine Seyrig qui fait respirer « moins ample. »
Le livre crée un dialogue avec Ma Mère rit (réédité en 2021 dans la collection L’Imaginaire chez Gallimard), le récit autobiographique de Chantal Akerman qui moi me déchire trop le cœur pour que je puisse le finir. Dans le contrechamp, Rêve Akerman réussit en une centaine de pages à nous connecter à la sensibilité de la réalisatrice : c’est comme si on venait de passer la journée avec elle dans un café et qu’elle nous avait raconté ses souvenirs en toute subjectivité.
Ce petit livre pépite participe à l’effervescence autour de Chantal Akerman cet automne avec notamment :
- la rétrospective Chantal Akerman orchestrée par Capricci dans plusieurs cinémas dans toute la France
- une exposition au Jeu de Paume : « Chantal Akerman. Travelling » jusqu’au 19 janvier 2025
- un coffret blu-ray de 46 de ses films sorti le 15 octobre 2024.
Rêve Akerman, Florence Andoka, éd. de la Variation, 119 pages. Sortie le 13/09/2024
