Olivia (1951), le premier film lesbien français : crudité décapante et mise en scène habile de la prédation

A partir d’aujourd’hui, la très chic plateforme LaCinetek propose dans son abonnement une pépite : Olivia (1951), réalisé par Jacqueline Audry. C’est le 1er film français clairement et crûment lesbien.

Affiche du film Olivia © Cyril Arnstam

Ce qui est sidérant dans ce film de l’après-guerre, c’est l’absence totale d’ambiguïté là-dessus : pas de crypto à décrypter, tout le monde est lesbienne Marina dans le pensionnat où arrive l’héroïne éponyme. La prof de lettres Mlle Julie (Edwige Feuillère) dirige l’établissement avec sa meuf, la migraineuse Mlle Cara (Simone Simon), et toutes les élèves ont un crush éperdu sur l’une ou sur l’autre.

Car Olivia appartient au sous-genre du film de pensionnat et traite de relations profs-élèves. Cringe et problématique ? Ce serait négliger le talent de Jacqueline Audry, réalisatrice trop vite oubliée car avalée par la Nouvelle Vague. La première apparition de Mlle Julie en haut d’un escalier en reine de gynécée est un délice d’ironie, annonciatrice de toute la perversité à venir.

Plus que mise à distance, la relation d’emprise que la prof noue avec ses élèves est mise en malaise : quand elle leur lit du Racine ou du Lamartine dans sa chambre ou quand elle leur rend leurs dissertations, Edwige Feuillère fait magnifiquement passer tout la cruauté de son personnage, toujours en train de piéger, de manipuler, de placer ses pions, avide de vampiriser l’admiration des jeunes filles.

Comment pourtant ne pas entrer en empathie avec Olivia, complètement chavirée par cette femme, l’expérience de tomber amoureuse d’une prof étant largement répandue dans la commu ? Ce n’est pas une histoire d’amour, c’est celle d’une identité lesbienne qui se construit comme elle peut dans les épais murs du patriarcat.

La géniale scène de bal, l’hilarante prof de maths qui déteste les maths autant qu’elle aime manger, l’absence quasi totale d’hommes devant et derrière la caméra comme dans Portrait de la jeune fille en feu… Il y a tant à dire sur ce film mais le plus beau, c’est la finesse de la mise en scène d’Audry qui montre à quel point elle fait confiance aux spectateur·ices pour comprendre ce qui se trame.

Bande-annonce :

Article écrit dans le cadre d’une collaboration commerciale avec LaCinetek à l’occasion de la mise en ligne de films de Jacqueline Audry.

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